un sage homme…

à propos du Blu-Ray « National Gallery » de Frederick Wiseman

Avec « National Gallery », son dernier documentaire en date, réalisé dans la célèbre institution londonienne, Frederick Wiseman réalise un film très élégant, limpide et coulé, d’une grande maturité formelle. C’est manifestement le film d’un amoureux, autant de peinture que de musée, qui rend un hommage sans emphase à l’activité humaine des lieux, scientifique et technique. Mais contrairement à nos attentes s’agissant du documentariste américain, bien connu pour son approche des grandes institutions sociales, Wiseman se détache assez rapidement du fonctionnement du lieu, qu’il s’agisse des réunions de direction ou de la gestion des publics. Ce que le cinéaste explore dans ce film avant tout, c’est la peinture, et comment celle-ci, bien des siècles après, continue à nous regarder autant qu’on la regarde, à nous faire parler sur elle, et à animer par sa présence les espaces d’exposition. En ce sens, « National Gallery » est autant un film de cinéma sur l’art, et sur la relation esthétique à la peinture : l’expérience contemplative, le questionnement, la fascination, voire sur la relation des arts entre eux (la peinture, la poésie, la danse et le cinéma), qu’un documentaire sur l’entreprise patrimoniale et pédagogique du musée qui est incarnée, comme toujours chez Wiseman, par une représentation très large du personnel.

Lieu
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…et quelques fous aimables

à propos du coffret DVD « La Belgique Interdite » chez Bach Films

L’image publique du réalisateur de documentaire belge Richard Olivier (surtout ici, en France), se résume principalement à sa contribution à Strip-Tease, l’émission de télévision belgo-française, pour laquelle il a réalisé sept sujets de courts-métrages. Pourtant, comme le montre ce coffret de six dvd, l’activité du documentariste est bien plus large. A côté de ses propres films, réalisés avec sa maison de production « Olivier Films », et le plus souvent en association avec la R.T.B.F., il y a l’écriture de pièces de théâtre, d’articles, de nouvelles, plus les 39 heures du projet « Big Memory », un film fleuve qui regroupe 170 portraits de cinéastes belges.

Avec un titre pareil – « La Belgique interdite » – le coffret de Bach Films affiche vertement la couleur des documentaires d’Olivier : des sujets scabreux, dans la lignée de Strip-Tease et de Tout ça (ne nous rendra pas le Congo) (les deux émissions de Jean Libon et Marco Lamensch), mais qui sont toujours portés par la sincérité « à vif » du réalisateur, par son empathie et ses coups de sang. L’appétit des rencontres humaines et le souci de comprendre excluent, par principe, de porter un jugement sur les personnes ou les pratiques, quelles qu’elles soient, même si le regard se colore parfois d’une légère ironie.

1_Elles

Khadija Leclere et Annick Ghijzellings dans « Elles m’ont dit »

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aube et crépuscule

Une

Le réalisateur de « Remorques » est – on le sait moins – l’auteur d’une œuvre documentaire dont ne subsiste que peu de traces, à l’exception d’un long métrage sur Chartres en 1923, et du film présent, devenu invisible jusqu’à sa restauration par les Archives françaises du Film. Tourné en septembre 1944, puis en juillet-août 1945, le film, « Le 6 juin à l’aube » n’est pas une célébration des opérations réalisées par les forces alliées, mais davantage un effroyable constat sur le martyr d’une région massivement bombardée, la Normandie, qui aura payé le prix fort de la Libération. continuer la lecture>

nuit américaine

PORTRAIT OF JASON

à propos de « Portrait Of Jason »(1966) de Shirley Clarke   (sortie en version restaurée le 19 mars 2014)

« Portrait of Jason » est le quatrième long-métrage de Shirley Clarke et peut-être l’un des plus singuliers. La réalisatrice américaine s’est affirmée à ses débuts par un mélange de fiction et de faux documentaire dont elle renverse ici les rapports. Le documentaire, direct et frontal, questionne les rapports ambigus entre la vie et la création, le faux et l’authentique, la manipulation et le voyeurisme… Mais c’est avant tout la puissance du témoignage et du portrait qui frappe, au-delà du filmage et de ses enjeux.….. continuer la lecture>

détrompe l’oeil

HFHW (0)

à propos de « Holy Field Holy War » de Lech Kowalski (sortie le 26 mars 2014)

Dans son nouveau documentaire, le réalisateur Lech Kowalski se rend dans la Pologne rurale pour observer les mutations des cultures et des élevages. Sous l’apparente permanence du paysage, les techniques intensives font ravage avec force pesticides qui empoisonnent le sol et l’atmosphère. Ce sont aussi de sournois forages souterrains, pratiqués dans le dos des petits exploitants qui minent la valeur de leurs sols et la qualité des eaux potables. Le documentaire, bien plus complexe et stratifié qu’il n’y paraît, ne se réduit ni à une simple dénonciation, ni à un appel, lancé ou relayé, à la vigilance ou au soulèvement. C’est un travail d’observation et d’immersion qui fait apparaître, très patiemment, des réalités dissimulées. C’est aussi un double portrait, sans apitoiement ni défaitisme, du paysage polonais et des travailleurs ruraux traditionnels.….……..……… continuer la lecture>